Les bâtiments des flottilles en Indochine (1945-1954)

Les bâtiments des flottilles en Indochine
LCI
LCG
LCT
LCA : Landing Craft Assault
LCS : Landing Craft Support
LCU
LCVP
LCM
LSSL
LSIL
LSM
VP
MFV
Chalands cuirassés
Jonques de guerre
Bâtiments divers
Engins de l'Armée
Les bâtiments utilisés par la marine française en Indochine appartiennent en majorité au catalogue très varié des « Landing Craft » anglais et américains du conflit mondial. Mais deux autres catégories méritent aussi examen : les autres bâtiments utilisés par la marine (d'origine extérieure ou de fabrication locale), et les engins utilisés par l'Armée.

Les Landing Craft (LC) d'origine alliée

L'étude et le développement de bâtiments spécialisés dans les opérations de débarquement, déjà entamés au Royaume-Unï avant 1939, reprit avec une nouvelle vigueur dès le lendemain de Dunkerque. L'entrée en guerre des Etats-Unis multiplia bien entendu le rythme et l'intensité des études et des fabrications. Il en résulta deux lignes de matériels, assez aisément reconnaissables l'une de l'autre, mais plus complémentaires que concurrentes - les développements en furent en effet coordonnés - et des engins des deux familles furent utilisés dans les deux marines.

Les appellations et sigles des différents bâtiments et engins ont été attribués de manière relativement systématique. On distingue en effet :

  • d'une part, les navires de débarquement, capables de longues traversées en mer et mesurant plus de 200 pieds de long (61 mètres), qui ont seuls droit à l'appellation de Landing Ship ("LS'' suivi d'une troisième lettre). Les plus connus sont les LST (Landing Ship Tank) véritables cargos déplaçant à pleine charge 4 000 tonnes, capables de s'échouer sur une plage et de mettre leur cargaison à terre par une double porte d'étrave et une rampe de débarquement. Les LST sont de presque tous de réalisation américaine, et c'est près de 1000 unités (982 exactement) qui ont été construites entre 1942 et 1945 ;
  • d'autre part, les unités de moins de 200 pieds de long, qui sont toutes des « Landing Craft » ("LC" suivi d'une troisième lettre, et souvent d'autres lettres ou chiffres).

Il n'existe pas en français d'appellation globale satisfaisante pour les types très divers entrant dans la catégorie LC : le terme « chaland de débarquement » rend bien l'idée du fond plat qu'offrent tous les LC pour pouvoir s'échouer sur les plages, mais ne laisse pas deviner que certains d'entre eux sont de véritables petits bâtiments de guerre ; de même, le terme « engin de débarquement » est certainement adéquat pour les plus petits LC, mais on peut le trouver lui aussi insuffisant pour les plus gros, qui ne sont ni des chalands, ni de simples engins. Car la catégorie anglo-saxonne des LC, telle qu'elle a été établie vers 1942, recouvre en fait deux sous-catégories, assez bien tranchées :

  • les grands chalands, qui ont une autonomie et une tenue à la mer appréciables, et qui ont entre 35 et 60 mètres de long environ (120 à 200 pieds) ;
  • et les petits engins, ayant une autonomie faible ou même très faible, non conçus pour la haute mer, et dont la longueur se trouve être toujours inférieure à 20 mètres (60 pieds).

Pour ce qui intéresse la guerre d'Indochine, les Landing Craft à considérer sont les suivants :

  • grands chalands : LCI (Landing Craft Infantry), LCG (Landing Craft Gun), LCT (Landing Craft Tank) ;
  • engins : LCA (Landing Craft Assault), LCS (Landing Craft Support), LCVP (Landing Craft Vehicle & Personnel), LCM (Landing Craft Mechanized).

Du point de vue de leur origine, on peut approximativement distinguer :

L'urgence des programmes de construction et le souci de la standardisation ont conduit les Américains à adopter un seul type de moteur pour tous leurs bâtiments et engins : ce moteur quasi universel, qui s'est révélé excellent, est le diesel Gray-Marine 6-71 (licence Général Motors Corp.), 6 cylindres, 225 CV, double circuit de réfrigération (eau douce et eau de mer), avec cependant deux variantes, suivant qu'il tourne « à droite » ou « à gauche ». On trouve :

  • sur les LCVP : un Gray-Marine,
  • sur les LCM : deux Gray-Marine (2 hélices),
  • sur les LCT.Mk6 : trois Gray-Marine (3 hélices),
  • sur les LCI : huit Gray-Marine, en deux groupes de quatre, couplés et synchronisés (2 hélices).

Dans le domaine de la standardisation, on peut aussi noter l'utilisation extrêmement répandue du canon de 20 mm Oerlikon (matériel conçu par une nation neutre, la Suisse, de même que le canon de 40 mm Bofors un peu moins répandu dans les flottilles, est d'origine suédoise)

La plupart des LC, du fait qu'ils sont destinés à transporter et à jeter à terre, en paquets, du personnel et du matériel, ne sont que des plate-formes, entourées du minimum de superstructures nécessaires et munies d'un système de propulsion à l'arrière. D'aucuns les qualifient, sans bienveillance, de « caisses à savon ». En tous cas, c'est sans nuance péjorative que l'on parle de la cuve pour désigner l'espace plan, à ciel ouvert, et entouré de murailles plus ou moins hautes, où sont en quelque sorte parqués les personnels et matériels transportés. Possèdent de telles cuves les LCT, les LCA, les LCVP et les LCM.

Ces quatre types d'engins sont donc, à priori, très vulnérables aux tirs de mortiers, et les plus petits, susceptibles de naviguer très près de berges qui les surplombent largement, sont de plus vulnérables aux jets de grenades. Il faut reconnaître que ces éventualités ne se sont jamais produites, ou tout au moins qu'il ne s'est jamais produit de drame de ce fait.

Pourtant les LCT n'ont jamais été couverts (sauf par des tentes qu'on n'établissait qu'en dehors des contraintes opérationnelles). Si les petits engins, LCA, LCVP et LCM, ont été munis de toitures fixes, ou semi-fixes (souvent en bois recouvert de toile goudronnée), c'est surtout afin de leur conférer une certaine habitabilité. Dans la conception anglo-saxonne, il n'était pas question que les équipages de ces petits engins séjournent à bord.
Dans l'utilisation qu'en font les flottilles d'Indochine, il est nécessaire que les hommes puissent vivre entièrement à bord plusieurs jours de suite, voire plusieurs semaines. Les toitures ainsi installées n'auraient d'ailleurs pas résisté à des obus de mortier (elles en auraient peut-être aggravé les effets), mais elles étaient capables de faire rebondir d'éventuelles grenades.

Enfin une dernière remarque générale : dans la description de l'armement des divers types de bâtiments et engins, l'armement portatif n'est pas mentionné : si les fusils et fusils-mitrailleurs sont peu utilisés, ainsi que les Piat (Projector Infantry Anti Tank, sorte de bazooka - lance-roquette à charge creuse - de fabrication britannique.), il n'en est pas de même des mortiers de petit calibre (50 mm, 60 mm, deux pouces,...), très appréciés des utilisateurs, mais impossibles à recenser.

Les bâtiments de la deuxième génération

Des nouveautés sont un des éléments de la mutation intervenue dans les flottilles à partir de janvier 1951. Ces nouveautés qui sont entrées en service en 1951 avaient été préparées (conception, ou négociation ?) auparavant, c'est-à-dire en général en 1950, éventuellement dès 1940.

Pendant la guerre du Pacifique, les LC anglo-saxons composent en fait deux catégories assez nettement, différentes : les grands chalands, et les petits engins. Pour éviter les erreurs qui peuvent résulter de cette dualité, l'US Navy décide, peu après la fin de la guerre, de changer la dénomination ("re-designate") des grands LC. Ainsi, les LCI(L) deviennent des LSI(L), les variantes (G), (M), etc... des LCI deviennent des variantes des LSI, et les LCS(L) américains passent aussi dans la classe des landing ships.

Louis Durteste et Net-Marine © 2009. Copie et usage : cf. droits d'utilisation. Photos collection Jackie Martin-Desbois, ECPA, dessins Claude Picard - Marines internationales juin 1980.


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