Engins utilisés par l'Armée

Dès le début de la guerre, et particulièrement lorsque des unités sont implantées en "secteurs" territoriaux, l'Armée s'équipe sur place de toutes sortes d'embarcations, selon les moyens que lui offre la batellerie locale ; chaloupes chinoises, petites jonques avec et sans moteur, bacs et tramways d'eau, sampans, de toutes tailles.

Et cette pratique non-officielle dure très longtemps : cette pérennité montre bien que le Fleuve, dans toutes ses ramifications, est et reste une voie de communication irremplaçable.

L'Armée a cependant aussi des formations fluviales organisées, avec des types de bateaux bien définis.

1 . Les bateaux blindés du Génie

Ils appartiennent, au début, à deux types, tous deux construits à Saïgon : le chaland blindé (ou "C.B.") et la pinasse blindée (ou "P.B."). Leur justification est de constituer des moyens de "franchissement discontinu" de cours d'eau, que le Génie met à la disposition des combattants lorsqu'il n'est pas en mesure d'établir un pont (ou un autre dispositif de "franchissement continu').

Sans insister sur les caractéristiques détaillées du chaland blindé et de la pinasse blindée (précisées dans la "Notice pour l'emploi de la compagnie de bateaux blindés du Génie", n°2046/3.5 du Commandant Supérieur T.F.E.O. en date du 26.09.47.), on peut dire que, du point de vue des performances, le premier est comparable à un LCM et la seconde à un LCA ; les silhouettes sont par contre totalement différentes.

La première "flottille" du Génie, composée d'un chaland et de deux pinasses, commandée par un lieutenant assisté de trois sous-officiers, entre en service le 15 octobre 1947, et une base est créée simultanément à Mytho.

Bien qu'il y ait initialement un programme ambitieux comportant 20 chalands et 60 pinasses, la réalité reste bien en deça : 5 chalands seulement sont construits, au lieu des 20 prévus ; on les retrouve, accompagnés de 5 pinasses, en service dans le delta du Mékong, en mai 1949.

A cette même date, le Génie dispose, en plus, de trois bâtiments appelés "Unicraft", un peu plus gros, plus rapides et plus fortement armés que les pinasses, mais n'ayant pas comme les chalands la possibilité d'embarquer un véhicule chargé ; ils sont d'ailleurs considérés comme des engins "de liaison et de reconnaissance".

Certains de ces bateaux du Génie sont armés par des sapeurs de la Légion Étrangère.

2 . Les vedettes de la G.V.N.S.

La Garde du Viet-Nam Sud (G.V.N.S.), formation dans laquelle les gardes vietnamiens sont encadrés par des Gardes Républicains français, comporte, entre autres unités, un "Groupe Autonome d'Escadrilles Pluviales", ou. G.A.E.F.

Ces escadrilles arment des ex landing-craft américains, d'un type que ne possède pas la Marine : le LCP(L), ou Landing Craft Personnel (Large).

Il s'agit d'engins à coque en bois, ayant à peu près les mêmes dimensions que les LCA, mais pontés et munis d'un cockpit vitré : il n'y a pas de rampe rabattable, mais un avant plat et assez bas d'où les troupes transportées peuvent aisément sauter à terre. La propulsion est celle des LCVP : une seule hélice, entrainée par un moteur Gray-Marine. L'armement, variable, ne dépasse pas le calibre 12,7mm.

Deux variantes de "VV" (pour Vedettes Vietnamiennes ?) existent : blindées et non blindées.

En mai 1949, sont en service 24 VV, moitié-blindées, moitié non-blindées, groupées en 4 escadrilles, basées respectivement à Saïgon, Mytho, Vinh-Long et Cantho.

3 . Les vedettes F.O.M. de la Cavalerie

Les vedettes "F.O.M." (comme France d'Outre-Mer) sont des engins construits en France, sur commande de l'Armée et sur crédit F.O.M.

Le premier modèle de vedettes F.O.M. consiste en un petit engin, à coque en acier, de 8 mètres de long seulement (soit 3 mètres de moins que le LCVP), et armé d'une mitrailleuse de 12,7 mm et de deux mitrailleuses de 7,62mm. Si ces vedettes F.O.M. manquent de l'atout que pourrait leur conférer une grande vitesse (elles ne font que 7 à 8 noeuds), elles sont très appréciées pour leur très faible tirant d'eau, 80 centimètres, qui leur permet d'aller plus loin que tout autre engin dans les petits rachs.

Ces vedettes F.O.M. sont armées par le 4ème Régiment de Dragons ; elles sont entrées en service en octobre 1949, sur la rivière de Saigon ; par la suite, leur nombre s'accroissant, on en trouve en de nombreux endroits, aussi bien au Tonkin qu'en Cochinchine.

Plus tard, apparaît un deuxième modèle de vedette F.O.M. ; plus grand (11 mètres), mieux armé (deux mitrailleuses de 12,7mm, trois de 7,62mm et un mortier de 60), plus rapide (11 noeuds) mais - hélas - de plus fort tirant d'eau (1,10 mètre).

4 . Les LCM du Train

La vocation de l'arme du Train étant d'effectuer les divers transports nécessaires aux armes combattantes, il est naturel que des "unités de transport fluviales" aient été rapidement créées en Indochine, puisque, dans les parties essentielles de ce pays, le réseau des voies d'eau est beaucoup plus dense que le réseau routier.

Ces unités de transport fluviales utilisent d'abord toutes sortes d'embarcations, à commencer par les inévitables chaloupes chinoises, ces maître-jacques du Fleuve.

Puis elles sont, progressivement, dotées de LCM, ceux-ci étant utilisés dans leur état d'origine, sans modifications ; ces LCM sont groupés en pelotons de huit engins (un officier, 80 homme environ). Deux compagnes à quatre pelotons sont ainsi créées, ce qui fait, en fin de campagne, 64 LCM !...

On peut enfin noter que des LCT.Mk.4, ces engins robustes et intéressants, ont été achetés et sont utilisés par divers organismes civils, tels que des compagnies privées ou l'administration des Travaux Publics.