Histoire de l'aviso-escorteur Enseigne de vaisseau Henry (1962-1994)
Dernier de la série des avisos-escorteur, l'Enseigne de vaisseau Henry a été mis sur cale à l'arsenal de Lorient en septembre 1962, lancé le 14 décembre 1963. Il est entré en service le 1er janvier 1965. Dès le début de sa carrière, il quitte Lorient pour une campagne de deux ans dans le Pacifique où il apprend les eaux bleues des lagons et les noms qui font rêver, Raiatea, Bora Bora, Rangiroa, Nuku Hiva, Huahiné... Dès ce premier séjour sa vocation tahitienne est affirmée, le Henry n'oubliera plus jamais la Polynésie avec laquelle il scellera une alliance : Uturoa sera sa deuxième ville marraine. On le retrouve pourtant pour un bref intermède dans l'océan Indien, basé à Diego-Suarez de 1970 à 1972 et on peut suivre sa trace de Tamatave à Bombay, de Djeddah à Karachi. De janvier à août 1970, il fait une mission qui commence dans les TAAF, puis se poursuit en Australie : Freemantle, Adelaide (où un sérieux accident avec le Plymouth a lieu lors de l'appareillage), Melbourne et enfin Sydney, pour les cérémonies du bicentenaire de la découverte de l'Australie par le Capitaine Cook. Après Sydney, il reprend la route de Diégo, avec escale à nouveau à Freemantle. Environ une heure après de le départ de Freemantle, les événements importants qui se déroulaient au Cambodge contraignent le bâtiment a faire route vers le Golfe de Siam où il assure une permanence sur zone de mai à août 1970 ; des patrouilles entrecoupées de deux escales à Bangkok et trois à Singapour. Le Henry sera relevé par le Kersaint qui, toutes affaires cessantes lui livre du vin, qui, il est vrai, manquait depuis 2 ou 3 semaines...! Ce sera sa seule infidélité au Pacifique. Mais c'est à Papeete où il a été affecté pendant 20 ans qu'il a pleinement vécu ; c'est de Papeete qu'il est parti pour sillonner la vaste Polynésie ou pour de grandes "touées" dans le Pacifique : une fois au Nord vers le Japon, une fois à l'est vers les Amériques ou vers Lorient. Le 23 avril 1982, les 21 membres d'équipages d'un chalutier sud-coréens sont sauvés par l'aviso-escorteur EV Henry, alors qu'ils dérivaient depuis une semaine sur ce qui restait de leur bateau, dévasté par un incendie suite à une explosion de moteur. Privé d'eau et de nourriture, les marins sud-coréen ont la chance de rencontrer l'EV Henry qui faisait route de Tahiti vers Hawaï. Ils sont ensuite transférés sur le Trieux qui les ramène à Tahiti.
L'Australie, vaste contrée d'où s'échappent les plaintes des tribus oubliées mais où se dressent les grattes ciels de la modernité reçoit régulièrement sa visite, Fremantle, Adélaïde, Melbourne, Sydney (4 fois) ; la Nouvelle-Zélande aussi, Auckland, Wellington... Mais c'est dans les îles du Pacifique et en Asie que ce voyageur infatigable trouve à s'exprimer pleinement ; on ne compte plus ses relâches à Honolulu ou Pearl Harbour (9 fois), à Suva ou Hong Kong (4 fois), à Surabaya, à Pago Pago, Yokosuka, Guam, Djakarta, Bangkok, Singapour, Balikpapan, Port-Moresby, Manille, Cébu, Apia, Kobé, Pusan... 26 commandants, des plus illustres, l'ont conduit à travers les mers jaunes, dans plus de 37 ports du Sud-Est Asiatique où la France a eu pour quelques jours la fière allure du Henry. Pour l'EV Henry maintenant, les "terrae incognitae" sont en Afrique et en Europe dont il n'a vu que le port de Lisbonne ; lui, dont le nom a surpris à Brest (quelle est votre compagnie ?), son nouveau et dernier port d'attache, commence à combler ces lacunes en débutant l'année 1991 par une nouvelle carrière en devenant le bâtiment escorte, la conserve de la Jeanne d'Arc. Djibouti,
le 8 janvier 1992. Ouvrant la route au groupe composé des avisos Commandant
Ducuing et Détroyat,
du BSL Rhin, du PH Jeanne
d'Arc et du BCR Var, les
avisos-escorteurs Commandant Bory,
Protet et EV
Henry ont pu, l'espace d'une journée, se remémorer le temps où, fraîchement
sortis des bassins lorientais, ils partaient de conserve à la découverte du
vaste monde. Leurs noms étaient déjà tout un programme, ils y furent fidèles.
Rappelant le souvenir de marins qui se sont illustrés dans l'aventure coloniale
de la France en Extrême-Orient, les avisos-escorteurs ont depuis près de trente
ans sillonné toutes les mers et rempli les missions les plus diverses. Bâtiments
en campagne, très marins, ils ont accumulé les jours de mer, les escales,
les milles parcourus ainsi que les Iper.
Le 14 janvier 1993 devant le port de Montévidéo, le Henry retrouvait non sans une certaine émotion, ses sisterships : Commandant Bourdais, Amiral Charner et Victor Schoelcher qui l'attendaient sous les noms respectifs d'Uruguay, Montevideo et General Artiga. Le 14 mars 1994, le Henry franchit le goulet de Brest au retour de sa quatrième et dernière croisière annuelle d'instruction. 25000 nautiques venait d'être parcourus, d'Alexandrie à Djibouti et Cochin ; de Singapour à Manille et Djakarta ; de Penang, en Malaisie, aux Mascaraignes et à Mascate, puis Athènes... 85 jours de mer, 138 jours hors de Brest. L'EV Henry sera remplacé dans ses fonctions par la frégate de surveillance Germinal. Fin avril 94, entre les deux rives de la Penfeld, un ultime " terminé barre et machines " marquera les adieux du Henry à tous les océans. Placé en réserve spéciale le 31 mai 94. Il a été désarmé le 20 août 1996 et, depuis novembre 1994, sert de brise lames devant le club nautique de Brest . En mai 2006, sa coque est remorqué jusqu'au cimetière marin de Landevenec. (Sources : Cols Bleus n°2118 du 23 mars 1991, n°2257 du 16 et 23 avril 1994, n°2157 du 8 février 1994, n°2204 du 20 février 1993) [Sommaire AE Enseigne de vaisseau Henry] . [Sommaire Net-Marine] |