Pattes d'épaules et manchons

2e partie : les manchons

1. Des solutions de fortune

Au cours de la seconde guerre mondiale, certains effets d’habillement fournis par les intendances alliées diffèrent sensiblement de ceux habituellement utilisés par la marine nationale. Il en est ainsi des blousons et chemises avec pattes d’épaules attenantes sur lesquels les pattes d’épaules mobiles, adoptées en 1912, ne peuvent s’adapter immédiatement.


Patte d'épaule "modifiée" pour pouvoir être portée indifféremment avec une veste ou une chemise à pattes d'épaules attenantes.

Dans un premier temps chacun essaye de faire au mieux en confectionnant des manchons à partir de bandeaux de galons ou en ajoutant des passants à ses pattes d’épaules. Cette dernière solution est entérinée par une circulaire du 17 avril 1948 qui dispose que les tenues de travail d’origine américaine (pantalon et chemise kaki) devront être portées avec des insignes de grade sous forme de pattes d’épaules.


Matelot d'une flottille amphibie en Indochine vers 1950. Ses insignes de grade sont constitués d'un simple galon cousu en fourreau
Deux mois plus tard, le 21 juin, une circulaire annonce la mise en service d’une nouvelle tenue de travail pour officiers et officiers mariniers.

Cette tenue réalisée en toile de lin gris bleu, tissu déjà retenu pour les vêtements de travail des quartiers-maîtres et marins, se compose d’un blouson, d’une chemise et d’un pantalon. Blouson et chemise comportent des pattes d’épaules fixes prises dans la couture du montage de la manche. Les insignes de grade et les attributs sont cousus sur un morceau de drap bleu d’uniforme formant fourreau et glissé dans les pattes d’épaules. Pour les officiers assimilés, les velours caractéristiques des différents corps débordent les galons de 5 millimètres environ. Mais aucune précision n'est apportée pour ce qui concerne les attributs de certains corps d'officiers en particulier l'ancre distinctive des officiers de marine.

2. L'adoption d'un article spécifique

En 1952, une circulaire prise sous le timbre de la direction du personnel militaire (n° 89 PM/ORG du 5 juin) annonce des essais en vue de définir les insignes de grade à porter avec les tenues de service courant en toile gris bleu.

A titre provisoire et en attendant cette définition, les insignes de grade de la tenue de service courant seront constitués :

- à terre, à l'extérieur des enceintes militaires, obligatoirement par les pattes d'épaules mobiles ;
- à terre, à l'intérieur des enceintes militaires et à bord, le port d'insignes en forme de « coulants » peut être autorisé.

Les essais entrepris aboutissement en 1953.

Au mois de juillet le blouson cède la place à un veston, également gris bleu, de coupe comparable au veston blanc et sur lequel les insignes de grade sont constitués par les pattes d'épaules mobiles.


Croquis annexé à la circulaire du 3 juillet 1953 (source bulletin officiel)

La chemise gris bleu portée avec ce veston conserve des pattes fixes boutonnées et pour permettre le port d'insignes de grade avec cette chemise, la circulaire n° 358 CMa3 du 3 juillet 1953 donne le descriptif d'un nouvel article dénommé « manchon demi-souple pour insigne d'épaule ».

Ce manchon est constitué d'une patte rendue demi-souple grâce à une armature en matière plastique d'un demi-millimètre d'épaisseur. Le dessus de cette patte est en drap bleu marine foncé ou en velours de la nuance caractéristique du corps. Il est doublé en tissu gris bleu de la nuance du tissu réglementaire de la chemise avec laquelle il doit être porté. Deux passants du même tissu permettent de l'enfiler sur la patte fixe de la chemise.

Les galons et attributs (ancres, écussons des officiers généraux, lyres des musiciens, ...) sont disposés comme sur les pattes d'épaules.
Toutefois le manchon ne comporte aucun bouton d'uniforme même si ce bouton fait partie du grade du porteur (cas des officiers des équipages, des sous-chefs de musique et des commis greffiers). Dans ce cas seule subsiste la patte caractéristique barrant les galons.


Manchon demi-souple d'un professeur général de 2ème classe de l'enseignement maritime.

L'abandon des effets gris-bleu au profit d'effets de nuance kaki pour les officiers et officiers mariniers, conduit le 1er juin 1957, à une modification de la circulaire de 1953.

Désormais le manchon demi-souple, destiné à être porté avec une chemise de couleur sera doublé en tissu noir grand teint et non plus gris-bleu.

Les galons et attributs (ancres, écussons des officiers généraux, lyres des musiciens, ...) sont disposés comme sur les pattes d'épaules.
Toutefois le manchon ne comporte aucun bouton d'uniforme même si ce bouton fait partie du grade du porteur (cas des officiers des équipages, des sous-chefs de musique et des commis greffiers). Dans ce cas seule subsiste la patte caractéristique barrant les galons.

L'abandon des effets gris-bleu au profit d'effets de nuance kaki pour les officiers et officiers mariniers, conduit le 1er juin 1957, à une modification de la circulaire de 1953.

Désormais le manchon demi-souple, destiné à être porté avec une chemise de couleur sera doublé en tissu noir grand teint et non plus gris-bleu.


Modèles de manchons demi-souples pour un officier principal des équipages (à gauche) et pour un premier maître sous-chef de musique (à droite)(Dessins © M. Delort).

 

 

Photo de gauche : Face inférieure d'un manchon du modèle mis en service en 1953 et d'un manchon du modèle modifié en 1957


3. Le besoin d'un modèle mieux adapté

Dans les années qui suivent, le manchon demi-souple suit la même évolution que la patte d'épaule, en particulier pour tout ce qui concerne les attributs distinctifs et insignes de grade. Cependant bien que constituant une amélioration par rapport à cette patte d'épaule, le manchon demi-souple n'apparaît pas adapté à certaines tenues. Le 4 novembre 1966, la circulaire n° 491 M/CMa 3 introduit un nouvel article dénommé manchon souple pour tenue de combat de commando.

Ce nouveau manchon qui permet le port des insignes de grade sur la patte d'épaule fixe de la tenue de combat se compose essentiellement d'un fourreau tronconique en drap bleu marine foncé sur le pourtour duquel est cousu le galonnage.

Il est constitué d'une pièce unique de drap bleu de forme trapézoïdale refermée sur elle-même et sur lequel le galonnage aura été préalablement piqué. Contrairement au modèle de montage adopté sur les autres manchons, lorsque les galons sont placés en chevron, le chevron part, non des angles de base du manchon, mais d'un point situé à un centimètre de la grande base du trapèze.

4. Vers le manchon « souple »

En août 1986, la notice technique n° 8455-1009 STCM va apporter quelques modifications à l'apparence du manchon demi-souple. L'armature qui lui donne sa rigidité peut désormais être constituée d'un rhodoïd dont l'épaisseur est réduite à 0,3 mm ou d'un thermocollant de rigidité comparable à celle du rhodoïd.

Les dimensions du manchon sont également modifiées. Sa longueur de totale est réduite de 110 à 100 mm et la largeur de sa base de 60 à 55 mm. Enfin les broderies, lorsque le manchon en comporte, sont effectuées mécaniquement avec de la laminette or et non plus en or.

En 1987, le jersey avec pattes d'épaules attenantes est généralisé à l'ensemble du personnel engagé ou de carrière. Puis le 11 juillet 1988, l'arrêté n° 124 modifiant l'arrêté du 13 mai 1975 relatif aux tenues et uniformes dans la marine met en service une tenue de service courant commune à toutes les catégories de personnel. Sur ces effets les insignes de grade se portent sous forme de manchons demi-souples dont le port est ainsi étendu à tous les quartiers-maîtres et matelots.

Jugé probablement encore trop rigide, le manchon est à nouveau modifié par la notice technique du mois d'octobre 1989. L'armature en rhodoïd disparaît définitivement. Le tissu de fond est alors simplement renforcé d'un « thermocollant de masse surfacique comprise en 120 g/m2 et 150 g/m2 ».

Le manchon est devenu pratiquement souple. Les différents textes traitant de cet article font cependant toujours mention d'un manchon qualifié de demi-souple « de façon à pouvoir être conservés sans gêne lorsque le veston est revêtu par-dessus la chemise blanche, le blouson de service courant par-dessus le jersey, la chemise ou la chemisette de service courant » (instruction du 15 juin 2004 relative aux tenues et uniformes dans la marine).

Nonobstant le caractère encore rigide du nouvel article, le manchon pour tenue de combat de commando est supprimé de la nomenclature à la fin de l'année 1991.

En application de la décision arrêtée par la commission de tenue le 23 mars 2005, les manchons demi-souples, comme les pattes d'épaules, comporteront pour l'ensemble du personnel des équipages de la flotte une ancre câblée brodée. Cette ancre est en laminette or pour les officiers mariniers, en soie rouge pour les quartiers-maîtres et matelots.

Seuls les personnels de certains corps - gendarmes maritimes, musiciens, aumôniers, peintres et écrivains de la marine, .. - conservent des manchons sur lesquels l'ancre brodée est remplacée par l'attribut particulier de leur corps (grenade, lyre, insigne du culte...).


Manchon souple pour tenue de combat de commando. Dimensions (notice technique) et modèle pour second maître.

Manchon demi-souple d'après la notice technique n° 8455-1009 du mois d'août 1986.


Manchon demi-souple avec ancre pour matelot

Manchon demi-souple
pour maître musicien de la flotte.

Manchon pour aumônier du culte musulman. Confectionné à la demande par un maître tailleur, ce manchon est entièrement souple

CRC1 (R) S. Le Coustour pour Net-Marine © 2010. Pour copie et usage : cf. droits d'utilisation. Remerciements à M. Delort.
Pour en savoir plus : voir « Pattes d'épaules et manchons, première partie ».