Débarquement en baie d'Arone d'agents de renseignements

Dès le retour à Alger. de notables améliorations sont apportées aux équipements du Casabianca. Un nouveau youyou est embarqué ainsi que cinq canots pneumatiques américains. Une nouvelle mission est préparée, dont le programme est établi comme suit ;

1. Débarquement en Corse de deux agents de renseignement: - Un adjudant-chef et un opérateur radio; - Deux postes B.7 (Emission - réception); - Quelques accumulateurs et un convertisseur de charge: - Un complément d'équipement destiné aux agents déjà débarqués. Les deux agents seront mis à la disposition de la mission Desaulle, avec laquelle un rendez vous est pris en baie d'Arone près du cap, Rosso.

2. Essai de débarquement de mitraillettes STEN et de munitions en un point qui sera fixé par le commandant Desaulle et l'enseigne de vaisseau Lasserre. Celui-ci sera récupéré par le Casabianca, ainsi que ses deux compagnons appartenant à l'équipage: LIONNAIS et VIGOT. On prévoit le transport de 1000 mitraillettes et 250000 cartouches.

3. Débarquement sur les côtes de Provence d'une mission de renseignement forte de trois agents: - Le capitaine de cavalerie Caillot, officier radio; - Le lieutenant Guillaume du Service de Contre-espionnage; - M. Brown, attaché au consulat américain d'Alger. Cette opération se doublera éventuellement de l'embarquement d'officiers français, désireux de rallier l'Afrique du Nord.

Deux rendez-vous ont été pris par radio l'un en Corse et l'autre en Provence. Le 1er février, la Corse fixe le rendez-vous dans la nuit du 5 au 6 février et la Provence donne rendez-vous à, l'embouchure du Var, au Cros de Cagnes, dans la nuit du 4 au 5. Le Casabianca ira donc sur les côtes de Provence d'abord, puis en Corse.

Le sous-marin appareille le ler février à 18 h 30, et la marche est réglée pour se trouver à 19 milles au sud du cap d'Antibes, le 4 février à 1 heure du matin. Trois officiers assurent la permanence du commandant sur la passerelle, les lieutenants de vaisseau Bellet (officier en second), Cornec et Chailley. Les officiers de quart sont l'ingénieur mécanicien Kerneur, l'enseigne de vaisseau Gohers et le premier maître Barbotin. La traversée se déroule sans incident. Dans la nuit du 3 au 4 février, on peut voir à près de 50 milles, les projecteurs antiaériens dans les environs de Toulon et d'Hyères. La Garoupe au cap d'Antibes est également équipée de projecteurs. La veille semble solidement organisée dans le secteur. A 1 h 50 (le 4 février), avant de plonger, le Casabianca reçoit un message des Anglais signalant que l'opération se présente mal. La région du Cros de Cagnes doit être surveillée. Aucun autre point de débarquement n'est signalé. C'est au commandant du Casabianca de prendre l'initiative et de choisir un point pour débarquer les agents. Après mûre réflexion, le commandant L'HERMINIER élimine la côte de l'Estérel trop surveillée et se décide pour une zone située entre Saint-Tropez et les îles d'Hyères. Le cap Taillat, entre le cap Camarat et cap Lardier, vraisemblablement occupés par l'ennemi se présente favorablement, car il est facile à identifier. Vers 21 h 00, le Casabianca entre dans la baie de Bon Porté et grâce au calme plat. le youyou débarque les trois agents et revient en peu de temps. Vers 22 h 30, le Casablanca met en route ses diesels après avoir et la silhouette d'un patrouilleur; il fait route en surface vers le cap Rosso à les batteries d'accus qui sont à plat. A 5 h 00, un patrouilleur ennemi est en vue; le Casabianca plonge et atterrit à 06 h 10 sur le cap Rosso. A 14 h 05, il se pose sur le fond en baie d'Arone après une approche en plongée. Par 45 mètres de fond, il attendra 20 h 30, pour faire surface et débarquer agents et matériel. Le 5 février à 20 h 30, le Casabianca se rapproche doucement et silencieusement de la plage. Aucune équipe d'accueil n'est en place, mais les agents, et deux matelots du bord partent à la côte avec leur matériel sur la plate. En fait, ils pourront prendre pied sur la plage mais la plate sera perdue et les deux hommes. du bord ne pourront pas être récupérés par le youyou. Dans les premières heures du 6 février, le Casabianca plonge et passe sur le fond une journée difficile et pénible en raison de la condensation. Le 6 à 20 h 30, le sous-marin fait surface par calme plat. Aucune trace des personnels débarqués n'étant relevée, le commandant L'HERMINIER décide de profiter du temps calme pour débarquer 450 mitraillettes et 60000 cartouches qui sont cachées dans une maison de berger en ruine. - Vers 01 h 00 du matin, le 7 février, le vent se lève et le Casabianca doit prendre le risque de s'échouer pour récupérer vers 5 h 00 son équipe de plage; puis, il plonge et se pose sur le fond en attendant la nuit. Le 7 au soir, il fait surface à 18 h 45. Une forte houle interdit la poursuite de l'opération. Le commandant L'HERMINIER décide alors de faire route sur Alger.

La deuxième mission à dans l'ensemble bien réussi. En effet, quelques Jours plus tard, les agents débarqués en Provence entrent en communication avec Alger et font savoir qu'ils désirent être repris au point où ils ont été débarqués. La liaison directe avec la Métropole est donc bien établie; elle fonctionnera jusqu'au débarquement du mois d'août 1944. L'équipe débarquée en Corse a bien rencontré les agents du commandant Desaulle et l'enseigne de vaisseau Lasserre a pu récupérer le matériel débarqué, et camouflé dans la maison de berger et le faire transporter en lieu sûr.


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