TITRE 2
L'INDOCHINE
1. Les préparatifs pour l'Indochine - Le départ en octobre 1945
Arrivée en Indochine |
Le
11 septembre 1945 est créé l'organisme "Forces Navales d'Extrême Orient" qui
entraînera la réorganisation de l'aéronautique navale.
Dans le cadre de la réorganisation des Forces navales en Indochine, la circulation
ministérielle n° 2089 EMG/AERO/3 du 24 août 1945 et l'ordre n° 217 EMG/AERO/3
du 1er septembre 1945 prévoient la constitution d'un "Groupe Aéronaval d'Indochine"
à envoyer dans cette colonie :
- Un état-major du commandement du groupement ;
- La flottille 8FE ;
- La base mobile n°1.
Les effectifs sont prévus par la circulation ministérielle n° 2365 EMG/AERO/1
du 26 septembre 1945.
L'aéronautique
navale est commandée par le contre-amiral NOMY, secondé principalement par
les capitaines de frégate LAHAYE et TUYSSEN.
A sa demande, la CF Ruyssen vient se rendre compte de l'état des Catalina
à Agadir. Ils ont beaucoup souffert du rythme d'activité imposé par la fin
de la deuxième guerre mondiale.
Le CF Ruyssen recueille l'avis du LV VARROQUIER, commandant la flottille 8FE,
et du LV Roux, commandant la base mobile n°1.
Peu
après, le Service Central de l'Aéronautique Navale ordonne l'envoi sur Saïgon
Tan Son Nhut de la 8FE armée dans un premier temps à 4 Catalina
disposant chacun de 1000 heures de potentiel, et de la base mobile pour assurer
leur soutien.
Les PBY-5A les moins usés par l'activité de guerre entreront en révision générale
à Cuers avant de rallier l'Indochine, afin de doter la flottille de 8 à 9
appareils et de 8 équipages. Les actions nécessaires sont vite entreprises
et les 4 premiers appareils choisis (46566, 567, 570, 574) entrent immédiatement
en visite à Agadir.
Le personnel, dans l'ensemble, est volontaire pour commencer une nouvelle guerre en Extrême Orient. L'Etat-major comprend :
Les 4 appareils quittent définitivement Agadir. Le Commandant de la 8FE décolle le 4 octobre pour rallier le Bourget le 5. Le LV LUCAS commande le premier détachement à 2 appareils, décolle du Bourget le 11 octobre et rallie Saïgon le 27. L'aérodrome est alors sous commandement britannique. Le LV VARROQUIER décolle le 13 après avoir été salué par le vice-amiral d'escadre LEMONNIER, chef d'Etat-major et par le contre-amiral NOMY et rallie Saïgon le 29 octobre via Istres, Malte, Le Caire, Habbania, Barhein, Karachi, Allahabad, Calcutta, Rangoon et Tan Son Nhut. La BM 1 suivra peu après, par voie maritime, avec l'échelon d'accompagnement technique de la 8FE.
On note qu'ils seront les premiers aéronefs rentrés en Indochine parce que, seuls, ils avaient le rayon nécessaire pour venir de France par leurs propres moyens. Ils ont été, pendant un certain temps TOUTE l'aviation française en Indochine.
2. Les Catalina en Indochine - Naissance de la 8F2 - La triste histoire du FXCHH
Carte du Vietnam |
Les premiers temps du séjour en Indochine furent particulièrement pénibles. L'arrivée sur un terrain sans base, où les logements sont précaires, d'une formation équipée d'appareils modernes n'allait pas sans problèmes.
Du 1er novembre au 31 décembre 1945, les opérations effectuées par le détachement Catalina pour le compte des forces expéditionnaires consisteront surtout en mission de reconnaissance, observations et attaques au sol. Trois appareils furent néanmoins touchés par des balles ennemies.
Le 5 décembre 1945, par circulaire ministérielle n° 3116 EMG/AERO/3, la 8FE prend la nouvelle désignation de Flottille 8F. Le texte précise que cette prescription sera exécutoire le 1er janvier 1946.
Utilisés tantôt
comme terrestres, tantôt comme amphibies, les Catalina
de la 8F rendent d'inappréciables services. Ils sont employés à tout: reconnaissance,
liaisons, interventions armées, évacuations sanitaires, etc. En février 1946,
ils participent au débarquement du Tonkin.
Jusqu'à l'entrée en ligne des 5 Spitfire de l'Armée de l'Air, les Catalina
de la 8F sont les seuls avions de guerre capables d'une intervention armée.
Même une fois les Spitfire engagés les Catalina
sont encore, en raison de leur grande autonomie, les seuls avions susceptibles
d'intervenir sur les zones dissidentes éloignées: plateaux Moïs, Sud Annam et
Haut Laos.
Le 6 mars 1946, lors de la reprise d'Haïphong, en l'absence de terrain d'aviation,
le manque de porte-avions se fait cruellement sentir. En effet, les appareils
de l'Armée de l'Air basés à Saïgon ne peuvent intervenir, tant qu'on ne leur
a pas assuré la disposition du terrain de Cat Bi à Haïphong. Néanmoins, le Force
Z qui doit assurer le débarquement des forces du général Leclerc n'est pas tout
à fait privée d'éclairage aérien grâce à trois Catalina
de la 8F qui utilisent les plans d'eau des îles Gao-Tao. Trois hydravions Aïchi
ex-japonais, embarqués sur le Béarn y participent également.
C'est un Catalina de la 8F qui assure le transport du président Ho Chi Minh de Hanoï en baie d'Along, le 24 mars 1946.
Très vite, la 8F se signale comme une "belle unité" à l'attention de tous les combattants.
La guerre d'Indochine (1946-1954) |
Les gros amphibies
de 17 tonnes se retrouvent sous tous les cieux d'Indochine, du Golfe du Siam
au Tonkin, en passant par le Laos, l'Annam, le Cambodge, la Cochinchine, le
Tonlé Sap, le Mékong, le Fleuve Rouge, la baie d'Along sont rayés du contact
de ses coques, tous les terrains gardent l'empreinte de ses roues.
Ses appareils sont vraiment bons à tous les rôles: en plus de ceux déjà cités
plus haut, les Catalina
ont effectué divers transports de troupes, de matériel, de médicament, de lancement
de tracts, la participation au blocus maritime, le ravitaillement lointain des
zones encerclées, de surveillance, de photographie et de transport d'autorité.
Avec 5 Catalina
pendant le 1er trimestre 1946, la 8F accomplit 284 heures de vol (44 missions
opérationnelles pour 172 heures de vol), transport de 139 passagers et 500 kg
de fret.
En mai, un autre Catalina,
puis deux autres grands "oiseaux blancs" vont faire peu neuve en Métropole et
leurs équipages goûteront une permission bien gagnée. La ronde s'organise car
le personnel et le matériel s'usent vite.
Second trimestre : 266 heures de vol au total: 28 missions pour 122 heures,
143 passagers et 4,5 tonnes de fret transporté.
3ème trimestre : 375 heures de vol au total, 42 missions en 188 heures, 236
passagers et 1,5 tonne de fret transporté.
Survol du Delta du Mékong |
Au troisième trimestre,
les missions continuent et s'intensifient. La 8F a maintenant 6 appareils. La
période est lourde et pénible, il faut être partout à la fois. La 8F double
son activité durant ce trimestre : 603 heures de vol au total, 60 missions pour
256 heures, 508 passagers et 11 tonnes de fret transporté.
En décembre 1946, on retrouve les Catalina
à Siem Réap et à Kratié, où ils participent à la réoccupation des provinces
de Battambang et de Sisophon, provinces que la Thaïlande s'était annexées au
cours de la guerre. A partir du 19 décembre, la 8F transporte des parachutistes
lors du soulèvement de Hanoï, au début officiel de la guerre avec le Viet Minh.
Au 1er janvier 1947, la flottille 8F se trouve sur la base aéronavale de Cat Laï. Elle assurera, pendant toute l'année, la surveillance maritime et participer aux opérations Léa, Catherine, Dédale. L'année 1947 est d'ailleurs le couronnement de la carrière des Catalina: ils sont partout en Indochine, le commandement supérieur les réclame pour toutes les opérations, et en particulier au cours des opérations dans le secteur de la Rivière Claire, à l'automne 1947.
Escale… |
Le 21 janvier,
par ordre EMG/M/O, la flottille reçoit une seconde citation à l'ordre du Corps
d'Armée et une seconde étoile de vermeil à sa croix de guerre 1939-1945.
Par le même ordre, le Groupement Aéronaval d'Indochine, sous les ordres du Capitaine
de Frégate Jalabert (JL) est également cité.
L'activité de la
8F pour le 1er trimestre indique 662 heures de vol, 118 missions pour 357 heures
de vol, 746 passagers et 11 tonnes de fret transportés.
A Toulon, le 18 février, trois amphibies Catalina,
destinés à la 8F sont en instance de départ. Ils n'arriveront que courant second
trimestre à Saïgon, par la voie des airs. En revanche, deux autres appareils
doivent rester en France pour révision générale.
Au second trimestre,
l'activité se renforce encore : 807 heures de vol au total, 159 opérations pour
405 heures de vol, 1036 passagers et 4,5 tonnes de fret transportés.
En avril 1947, première opération à Hoa Binh. Les Catalina
y servent de PC Transmissions volants, d'avions de reconnaissance et d'appui
feu.
Au cours du 3ème
trimestre, la 8F est renforcée par 4 appareils révisés à Cuers. Elle comprend
alors 6 Catalina
en ligne et 2 en volant de maneouvre. Les appareils participent aux opérations
Pégase, Hermès et Bentre. Son activité est de 776 heures de vol au total, 219
missions opérationnelles pour 596 heures de vol, 647 passagers et 4,5 tonnes
de fret transportés.
Pendant le 4ème trimestre, la 8F voit ses avions se trouver à de nombreuses
reprises sous le feu adverse et plusieurs appareils ont été touchés.
Au Tonkin, trois "Cat" de la 8F ont participé aux opérations, accomplissant
un grand nombre de missions de reconnaissance au profit de l'Armée, malgré des
conditions atmosphériques et géographiques très difficiles (très nombreux vols
dans des vallées encaissées). Le reste de la flottille continue de participer
aux opérations en effectuant des missions diverses: reconnaissance, mitraillages
et protections de convois routiers et fluviaux. De nouveau, à huit reprises,
ses appareils sont touchés. Le Haut Commissaire de France pour l'Indochine lui
témoigne sa gratitude pour une série de reconnaissance effectuées entre le 7
et 21 octobre.
Une des têtes de loup noir |
En effet, les
8 têtes de Loup noir ont maintenant un bilan impressionnant dans la sécheresse
des chiffres : en moins de deux ans, plus de 3000 heures de vol dont 2000 en
mission de guerre, soit sur terre en appui des troupes, soit surtout sur mer
pour assurer le blocus des côtes et empêcher l'apport d'armes et de renfort
aux rebelles. Plus de 3000 passagers transportés, ainsi que 30 tonnes de fret
précieux (pénicilline, sang, vaccins, médicaments).
200 blessés évacués, qui doivent souvent la vie à un amerrissage en catastrophe
en plein Mékong ou Bassac, qui évitait le long convoi fluvial ou routier qui
aurait amené leur mort. En Cochinchine, la 8F a participé à l'assainissement
et au contrôle de la plaine des Joncs, du Bassac et du Bas Mékong. En Annam,
on la retrouve à la reprise de Nahtrang, Dalat, Phan Tiet, Ben Methuot. C'est
son appui qui aide à l'ouverture du col Véléra. De Tourane jusqu'aux portes
d'Annam, en passant par Hué, Quang Tri Dong Hoi, ses appareils guident et protègent
l'avance des troupes.
Au Tonkin, commençant
par la prise de Chapkwan, la 8F coopère à la reprise de la route Hanoï - Haïphong,
elle participe en appui à tous les convois sur le fleuve rouge, la rivière noire,
le canal des bambous et la rivière claire. Ses radios appellent en renfort la
chasse de l'Armée de l'Air, permettant ainsi de dégager souvent des troupes
dans les opérations de Noa Binh, Phuto, Vietri, Nam Dinh et Haiduong.
Mais, envers du décor, les Catalina
ont pris l'habitude de se faire trouer la coque par la DCA adverse, mais une
des plus chaude alerte, en juillet 1947, provient de l'explosion à bord d'une
grenade au phosphore. Résultat: 7 blessés, dont certains graves. La liste des
blessés de la flottille est longue et beaucoup sont à l'hôpital. L'ensemble
des appareils a été touché plus de 30 fois.
Au 4ème trimestre, la 8F a effectué 949 heures de vol au total, 268 missions en 769 heures de vol, transporté 922 passagers et 2 tonnes de fret.
Le 23 juin 1947, elle reçoit la croix de guerre des T.O.E. (Théâtres d'Opérations Extérieurs) avec palme (citation de l'armée par décision du 23 juin 1947).
Lors de l'opération
Pierre (1er au 7 février 1948), la protection est assurée par le mitraillage
d'un Catalina,
puis du 21 février au 10 mars, toujours dans la région de Dong-Trieu, réglage
de tir par un autre Catalina.
Opération sur Ham Dinh (éclairage de protection), toujours par un Catalina.
La 8F participe également aux opérations de Van-Uc et Song-Thuaï-Binh (26 et
27 janvier). Un Catalina
est basé à Haïphong aux ordres du commandant de la marine au Tonkin. Sa mission
principale consiste à protéger toutes les opérations amphibies et sa mission
secondaire à renforcer la surveillance maritime du Tonkin.
Deux autres appareils de la 8F sont placés aux ordres de l'Amiral commandant
la Division navale d'Extrême orient (DNEO) pour la surveillance maritime depuis
la frontière du Siam jusqu'à celle de la Chine (durant ce premier trimestre
1948, tout l'intérêt est porté sur le Golfe du Tonkin et le centre Annam). Le
premier Catalina
est basé à Haïphong et le second soit à Tourane, soit à Haïphong. Deux autres
appareils (ainsi la 8F est complètement dispersée) sont armés et sont mis à
la disposition du Général, commandant les troupes françaises en Indochine sud
(TFIS). Ils sont intégrés "pour emploi" dans le groupement aérien occasionnel
appelé "Groupement Tactique Sud" (GTS), qui comprend tous les moyens aériens
(Air et Aéronavale) prenant part aux opérations en Cochinchine.
Le GTS est placé sous le commandement d'un officier supérieur de l'Air, auquel
est adjoint un officier de l'aéronavale. Au cours du 1er trimestre 1948, la
8F accomplira 674 heures de vol, 141 missions en 416 heures, transportera 895
passagers et 700 kg de fret.
Le 2 avril 1948,
l'instruction n° 148 EM/3/FMEO réorganise le commandement de l'Aéronautique
navale en Indochine. Elle dote la surveillance maritime d'un troisième Catalina
de la 8F. Les trois appareils sont basés respectivement à Haïphong, Nha-Trang
et Saïgon. Deux autres appareils de la flottille sont destinés l'un aux opérations
du Tonkin et l'autre à celle de Cochinchine (aux ordres du général commandant
les TFIS, par l'intermédiaire du GTS déjà cité. La 8F comprend alors 9 appareils
dont 6 disponibles. La DCA rebelle s'intensifie (Un Catalina
reçoit 6 impacts de balle au cours d'une mission au dessus du Tonkin).
Pendant ce second trimestre 1948, la flottille effectue 620 heures de vol au
total, 152 missions en 448 heures de vol, transporte 750 passagers et 5,5 tonnes
de fret.
A la suite d'engagements particulièrement violents au Tonkin, en mars, avril
et mai 1949, le commandement est à nouveau conduit à utiliser toutes les possibilités
du Catalina.
Mais la DCA est de plus en plus efficace. Le 25 mai, un appareil, atteint dans
ses réservoirs d'huile, est contraint à un atterrissage d'urgence à Viétri,
sur le Fleuve Rouge.
La flottille reçoit une nouvelle citation à l'ordre de l'Armée (seconde palme) par décision du 26 mai 1948.
Après plusieurs incidents (appareils touchés par des obus adverses), on renonce à utiliser les Catalina en appui direct à basse altitude : ils sont vraiment trop lents et constituent des cibles magnifiques. On leur interdit donc tout vol à moins de 2000 pieds, et on ne les utilise plus qu'en reconnaissance, bombardement et surveillance maritime.
Au 3ème trimestre
1948, les appareils de la 8F (9 appareils dont 6 disponibles) ont totalisé 707
heures de vol, ont effectué 171 missions en 592 heures, transporté 830 passagers
et 8,2 tonnes de fret.
Au dernier trimestre, la flottille participe aux opérations Sirène, Dragon Ter,
Tondine, Pégase et de nombreuses missions d'exploration au profit des bâtiments
de surveillance. Pour ce trimestre, 806 heures de vol sont effectuées, 179 missions
opérationnelles en 689 heures, 453 passagers et 1,5 tonne de fret sont transportés.
La 8F devant un Catalina américain |
Pendant toute l'année
1949, par suite du manque de rechanges, la 8F se trouvera dans une situation
très médiocre. Heureusement, l'esprit d'initiative du marin, couramment appelé
"débrouillardise", viendra pallier, dans une certaine mesure, les déficiences
du matériel.
Pendant le premier trimestre, les Catalina
de la 8F participeront à de nombreuses missions d'exploration pour la surveillance
maritime ou fluviale, protection des convois du fleuve rouge et de Cantho. La
flottille participe par de fructueux bombardements aux opérations Nicolai (Cochinchine),
Nacelle (Tonkin) et Mousson (Golfe du Siam). Un appareil a eu un moteur stoppé
net par la DCA rebelle le 3 février. Un autre recevra le 20 mars de nombreux
impacts de mitrailleuse.
L'activité du premier trimestre se résume en 506 heures de vol au total, 127
missions en 436 heures, transporté 367 passagers et 4 tonnes de fret.
Le second trimestre a été consacré à la surveillance maritime. A l'exception d'une jonque repérée par un avion de la flottille le 26 mai au sud de la pointe de Camau et qui fût saisie par le Jasmin, ces missions ne permirent pas de déceler l'existence d'un trafic rebelle au large des côtes. Au cours de ce trimestre, 686 heures de vol ont été effectuées, 148 missions pour 541 heures, 191 passagers et 2,8 tonnes de fret ont été transportés.
Au cours du troisième trimestre, une mission de surveillance trouve un caboteur Viet de 100 tonnes, le Sing-Kong, qui sera obligé de se saborder. Les appareils de la flottille participent aux opérations Alpha et François (en Annam), Betel, Origan, Banam et Cobra (en Cochinchine). Faute de matériels de rechange, l'activité s'est ralentie: 415 heures de vol au total, 60 missions pour 351 heures, 372 passagers et 5,5 tonnes de fret transportés.
Au quatrième trimestre, les Catalina de la 8F participent aux opérations Junon, Loire, Anthracite, Cobra, Potanie, Agatha, Daturna, Iroquois, Ebene, Trompette, Diabolo et Cauxe, et effectuent deux missions particulières de bombardement au Tonkin. Les appareils effectuent 359 heures de vol au total, 56 missions en 205 heures, ont transporté 552 passagers et 900 kg de fret.
L'année 1949 a
vu la réduction progressive de l'activité de la 8F qui atteindra au cours du
4ème trimestre son point le plus bas. Mais l'activité dépend de l'arrivée de
certaines pièces de rechange demandées et non reçues.
Le Commandant l'explique ainsi: "L'activité actuelle de la 8F se traduit
au maintien en service d'un ou deux appareils. Cette pauvreté tient au fait
suivant :
La situation des moteurs devrait s'améliorer au cours du premier trimestre 1950, mais l'activité de la 8F restera encore conditionnée par le ravitaillement en rechange d'avions et en radiateurs d'huile manquants".
Pour la 8F, on trouvera le 4ème trimestre 1949, du 15 septembre au 21 octobre un Catalina à Haïphong, du 22 octobre au 15 novembre un Catalina à Haïphong et un à Saïgon, du 15 novembre au 4 décembre un à Haïphong, du 4 au 15 décembre aucun Catalina disponible en état de voler.
Pendant les six premiers mois de 1950, la 8F continuera à se traîner dans une grande misère, handicapée par la pénurie d'appareils, la pénurie des pièces de rechange, les trop nombreuses révisions.
Sur le parking… |
Au premier trimestre, le 11 janvier exactement, la Catalina 8F 7 repère une jonque venant de Cumong (Song Cau) à 60 nautiques au sud de la pointe de Hega. L'Aubépine l'arraisonne (2500000 piastres, des caisses de médicaments, des caisses d'armes récupérées - et d'autres détruites par jets en mer - 14 prisonniers). Le 6 mars, au cours d'une exploration maritime au large des côtes d'Annam, le Catalina 8F 8 (EV de Corail) en panne est contraint à un amerrissage forcé. Il coulera au cours de son remorquage par le La Grandière. Pour ce trimestre: 497 heures de vol sont effectuées, 134 missions en 424 heures et 874 passagers sont transportés.
Au cours du second trimestre, les appareils de la 8F participent aux opérations Pastis et Potager et effectuent 496 heures de vol, transportent 85 passagers et 3,6 tonnes de fret. Du 26 avril au 15 mai, aucun appareil n'est disponible.
Les Catalina prennent part aux opérations Normandie, Caimon, Ramadan, Naja, Rouleau et Gamma. Ils ont effectué 44 missions de surveillance (14 au Tonkin, 24 en Annam, Côte d'Annam, Paracels, 6 aux bouches du Mékong). Pour le trimestre 731 heures de vol sont effectuées au total, 85 missions en 515 heures et 271 passagers sont transportés.
Au cours du quatrième
trimestre 1950, le fait marquant est l'arrivée de dix quadrimoteurs Privateer
PB-4Y en provenance des Etats-Unis et affectés à la 8F, qui cédera ses vieux
hydravions à la 8S.
La mise en oeuvre des Privateer
entraîne un développement de la B.A.N. de Tan Son Nhut et de la base de Tourane.
Pour la 8F, la répartition tactique des appareils est pendant ce dernier trimestre:
1 Catalina
et 10 Privateer
à Tan Son Nhut, 1 ou 2 Catalina
à Haïphong, 1 ou 2 Catalina
à Tourane. La flottille a réalisé l'activité suivante: 711 heures de vol au
total, 112 missions en 318 heures, 355 passagers et 800 kg de fret transportés.
Avec la disparition des Catalina disparaîtra également une activité annexe de la 8F, activité qui ne manquait pas d'intérêt: les convoyages en France pour révision générale (dont certains durèrent plus de cinq mois !).
La 8F reçut trois
citations pour sa participation aux opérations d'Indochine :
- une à l'ordre du Corps d'Armées ;
- deux à l'ordre de l'Armée de mer.
La triste histoire du FXCHH
(par le QM1 Marcel FAVRY - ex Timonier sur l'aviso La Grandière 1949 - 1951 Adaptation et commentaire : Léon C. Rochotte, ex-Radio sur l'aviso La Grandière, ARDHAN).
6 Mars 1950 - Quelque part dans le Golfe du Tonkin Sud d'Haïnan, l'Aviso La Grandière est en patrouille depuis des jours. Nous étions en SURMAR (mission de surveillance maritime) depuis des jours et des jours à l'affût des grosses jonques et des cargos venus d'Haïnan. Le ciel était bas et gris, une longue houle berçait gentiment notre bel aviso. Soudain, un appel radio nous prévient qu'un Catalina était en difficulté (panne d'un moteur). Changement de cap et "En avant toute !" et nous voici tous à scruter l'horizon, tentant de repèrer nos "Pingouins" piteusement amerris. Le Catalina appartenait à la Flottille 8F et portait le Serial Number 48358. Le commandant de bord, l'EV1 de Corail, et les 7 membres de son équipage sont indemnes.
Au bout de quelque temps, hydravion en vue! Et tous les regards de converger sur ceux que nous recherchions. L'approche était facile, encore que la houle commençait à se creuser. Le whale-boat fut mis promptement à la mer et les aussières frappées. Et nous voilà "en avant lent" remorquant notre PBY, pauvre goëland silencieux...
Mais la mer fatiguait et au bout d'une paire d'heures, la remorque cassait : le point d'ancrage sur la coque du Catalina avait cédé. Deuxième essai, deuxième échec. La mort dans l'âme, il fallait nous résoudre à abandonner le sauvetage.
Après avoir fait évacuer tout ce qui pouvait l'être (les Pingouins évidemment, leurs documents, les armes, la radio...), le Pacha, capitaine de frégate Ybert, opta pour une école de tir sur la cible magnifique. Et nos canonniers de se livrer sans joie à l'éxécution.
Après quelques salves, le pauvre PBY s'embrase. Il coulera en quelques minutes... Un petit grain se lève. La triste pluie pleure avec nous la disparition de notre malheureux Catalina.